Pour la religion, c'est la croyance (la foi, disent ses adeptes qui, pour faire bonne mesure mettent une majuscule à "Foi") qui fonde la réalité. Pour la Raison (oui, j'y mets une majuscule, moi aussi; pourquoi se priver), c'est la perception de la réalité et l'étude de cette réalité qui fonde la vérité. Et c'est par l'exercice de l'intelligence qu'on peut tenter de s'approcher un peu plus de cette vérité dont les limites reculent au fur et à mesure des progrès de l'intelligence.
Pour les religions, la Vérité est première. C'est par elle qu'on explique la réalité et c'est sur cette Vérité qu'on fonde les lois et les règles de vie, y compris le modèle de la société où cette religion domine.
Or, la tolérance implique que soit reconnue une infériorité du toléré par rapport au tolérant. C'était déjà le cas en Espagne musulmane lorsque l'Islam "tolérait" les autres religions et même les "protégeait" (de qui? des musulmans?) en échange d'un impôt.
La République tolère les religions à condition qu'elles reconnaissent que la loi de la République est supérieure aux règles religieuses et qu'en conséquence elle s'applique aussi aux adeptes des religions. Toute religion (aussi "modérée" soit-elle) qui proclame que la loi de Dieu s'impose en dernier ressort même en cas de contradiction avec la loi républicaine est "hors-la-loi".
Besson veut former des imams (voir mon article précédent) dans les universités publiques. Certes, il veut leur apprendre les Droits de l'Homme et la laïcité. C'est bien gentil à lui. C'est reconnaître par là qu'ils les ignorent, que cette ignorance est dangereuse pour l'Etat dans la mesure où certaines prescriptions de l'Islam (ou de certaines de ses tendances) contredisent les lois républicaines et qu'il est du ressort, (mieux! de l'intérêt) de la puissance publique de les leur enseigner. Toute leur "science" en tant qu'imams (sans préjuger de leurs connaissances annexes) n'est que théologique et est issue du Coran que la République, à ma connaissance, n'a pas annexé à sa Constitution.
C'est à la fois une erreur et une faute.
C'est une faute car c'est officialiser un peu plus une tolérance qui confine à la complaisance. C'est donner à l'opinion l'impression d'une nouvelle reculade. "Quelle sera la prochaine étape?", est-on en droit de se demander. C'est aussi ouvrir la porte aux revendications que pourraient formuler d'autres religions, majoritaires ou non.
C'est une erreur car seuls des imams "modérés" suivront cette formation. Les autres, les fondamentalistes, se feront une gloire de l'ignorer, ce qui leur vaudra un prestige accru auprès de ceux qui se disent des "vrais musulmans". Besson obtiendra donc le résultat contraire au but qu'il déclare poursuivre. Son initiative risque de créer et d'exacerber des conflits entre musulmans. L'actualité récente nous en a déjà donné des exemples.
C'est tout pour ce soir.