En complément à l'article de Pascale (en lien dans la rubrique "Allez voir"), j'ai relevé dans Le Figaro un bel exemple d'hypocrisie de la Commission Européenne, hypocrisie que relaie le Figaro sans vraiment s'en émouvoir.
Mais avant l'hypocrisie, il y a l'aveu: l'importation des maïs génétiquement modifiés "destinés à l'alimentation humaine et animale" est autorisée "dans un but commercial". Traduction: uniquement pour du pognon. Ni les animaux, ni les hommes n'en tireront un quelconque bénéfice sauf les semenciers (Monsanto, Syngenta et Pioneer) et peut-être les agriculteurs américains et brésiliens qui les utilisent. Ne vous faites pas d'illusion! Cette autorisation ne fera baisser ni le prix de la viande ni celui de tous les produits alimentaires dans la composition desquels entrent le maïs et ses dérivés (amidon de maïs par exemple).
Et maintenant l'hypocrisie. Je devrais écrire LES hypocrisies:
1°- le porte-parole de la Commission qui a annoncé la nouvelle a précisé "pour l'alimentation humaine et animale". On comprend qu'avant cette autorisation, ni les hommes, ni les bêtes ne consommaient ces maïs OGM. Eh bien on a tort de comprendre! On apprend un peu plus loin, et là je cite Le Figaro, "que les animaux d'élevage (volailles, bovins, porcs) sont nourris majoritairement avec des mis OGM importés des Etats-Unis ou du Brésil mais paradoxalement interdits de culture en France".
"Majoritairement", cela veut dire que vous l'avez dans l'os. Vous croyiez que votre boeuf, vos poulets, votre lait, vos oeufs et votre charcuterie avaient échappé aux OGM, eh bien pas du tout. Majoritairement, je le répète, vous l'aviez dans l'os. Ça vous apprendra à faire partie de la majorité.
Quant à "paradoxalement", c'est de l'hypocrisie "figaresque". On vous suggère de penser que puisque, de toutes façons, on vous a fait un enfant dans le dos par surprise, autant que vous donniez votre accord la prochaine fois que la Commission vous posera la question: "Tu veux ou tu veux pas?". Ça vous fera moins mal.
Le Figaro se félicite: Cette autorisation va "permettre d'éviter le blocage des cargaisons de maïs conventionnel [...] en raison de la présence fortuite de traces d'OGM". Je vous laisse savourer "conventionnel" et apprécier "fortuites". Le prochain maïs étiqueté "sans OGM" pourra donc, en toute légalité, être "avec OGM".
2°- l'autorisation a été donnée "pour sortir de l'impasse", a déclaré un porte-parole de la commission. Quelle impasse? Il y avait donc une impasse? Nous n'étions pas au courant pauvres citoyens que nous sommes! Heureusement que Barroso qui ne veut que notre bonheur veille sur nous!
L'impasse, la voici: la commission avait demandé aux Etats membres de se prononcer pour ou contre l'autorisation à la majorité qualifiée. Cette majorité qualifiée, on ne l'a pas trouvée car il y a en Europe des gouvernements pour et des gouvernements contre mais pas assez d'un côté ou de l'autre (pour les consommateurs, pas de problème: si on leur posait la question, les sondages indiquent que la majorité serait plus que qualifiée pour le "contre").
Au lieu de dire: "Tant pis, en attendant qu'on trouve un accord, chaque pays fera comme il l'entend", la commission en se référant au traité de Lisbonne, celui que le Parlement a accepté après que vous, mauvais Européens!, vous eûtes dit non au traité constitutionnel (pensez-y lors des prochaines législatives), a dit quelle était "obligée" de donner son autorisation. Ce qu'elle ne dit pas c'est qu'elle n'était pas "obligée" de poser la question. Vous parlez d'une "impasse"!
3°- dans un inter-titre en gras et gros caractères, Le Figaro en rajoute une couche et émet une vérité pourtant controversée: "Ces OGM sont destinés surtout à l'alimentation animale et ont obtenu un avis scientifique favorable". Passons rapidement sur le "surtout". Manger des produits animaux nourris aux OGM fait de vous des consommateurs d'OGM en bout de chaîne alimentaire. Mais le "surtout" n'est vrai que si l'on tient compte de la quantité: les animaux mangent plus de maïs que vous n'en avalez sans le savoir, dans les plats cuisinés, la biscuiterie, la confiserie, la boulangerie etc.
Mais l'avis scientifique favorable est surtout l'avis de scientifiques favorables aux OGM, soit parce qu'une grande partie des études sont entreprises par les producteurs d'OGM eux-mêmes, soit parce qu'elles sont commandées à des laboratoires subventionnés par ces mêmes producteurs (vous vous souvenez de ces experts en grippe H1N1 et leurs liens avec l'industrie pharmaceutique). Et les avis défavorables sont occultés et ceux qui les émettent souvent ostracisés. Et pourtant, pour ne citer que deux exemples, des tests sur animaux effectués en quelques semaines et non pas quelques années sont-ils sérieux, surtout quand on sait qu'il a fallu des années pour mettre en lumière et reconnaître les dangers du paraben, du bisphénol A ou de l'amiante? Doit-on être rassuré par l'avis du Haut Conseil des bio-technologies (objectif comme son nom l'indique!!!) qui, à propos de la pomme de terre OGM Amflora n'a pas "identifié de risque majeur lié à la consommation du végétal". Risque majeur, c'est quoi? Mort subite? Il y aurait donc des risques mineurs. Lesquels?
Tout cela prend toute sa saveur quand Le Figaro admet que tout cela a été décidé "malgré le peu d'appétit des Européens pour les plantes transgéniques" et "malgré les les débats et les crispations sur la question des OGM dans l'Hexagone".
Conclusion: Vive le Figaro! Vive la Commission, Vive les OGM! Vive Barroso! Vive le pognon!
Et bonjour chez vous!