Le Huron, Pangloss et compagnie

Fillon, a dit la presse aux ordres, a "joué la transparence" en dévoilant lui-même les conditions dans lesquelles il a passé le vacances de Noël en Egypte.

Vous parlez d'une transparence! Un mois et demi après! Ne parler que juste après que le "Canard enchaîné" est arrivé dans les ministères et les rédactions et jute avant qu'il soit dans les kiosques et faire profil très bas pendant la polémique dans laquelle MAM et Ollier (n'oublions pas Ollier!) étaient empêtrés en espérant être épargné par la tempête médiatique.

Transparence? Tiens, fume!

Et cette excuse qui permet d'affirmer que ce n'est peut-être pas très propre mais que c'est "courant"! Mais que maintenant -juré-promis- on va être plus sérieux!

Et Barouin qui fait semblant de n'avoir rien compris et qui, en sa qualité de porte-parole, met ça sur le terrain de la "protection" d'un chef de gouvernement.

Et Juppé qui le soutient en disant que ces vacances en famille étaient un "voyage officiel" sous prétexte que Fillon a rencontré Moubarak! La moindre des choses quand on est invité par quelqu'un c'est de rencontrer son hôte, non?

Et Sarko qui dit que dorénavant (et jusqu'à désormais?) le voyages de ministres seront soumis à l'approbation du premier ministre ou d'un conseiller diplomatique de l'Elysée. Fillon devra-t-il approuver son prochain voyage? Et qui approuvera les voyages de Sarko?

Transparence? Un peu de moralité suffirait.

Allez donc écouter la revue de la presse internationale diffusée ce matin sur France-Culture, vous serez édifié sur ce qu'on pense de nos gouvernants à l'étranger.

Pendant que MAM essaie maladroitement de se dépatouiller des conséquences de son voyage en Tunisie, on apprend que Fillon a passé les vacances de Noël en Egypte avec femme et enfants, invité "à titre privé" par "les autorités égyptiennes". Tous frais payés par le raïs, vols intérieurs compris, bien sûr. Seul lui a été facturé (quand même!) mais au "tarif établi par l'armée de l'Air" (ça fait combien?), son voyage sur le Falcon 7X du gouvernement (aucun rapport du point de vue du confort avec les avions affrétés par les compagnies low-cost). L'excursion (qu'est-ce qu'ils aiment les "excursions" au gouvernement!) à Abou Simbel était comprise dans le forfait "Hosni Tours".

C'est évidemment par pure bonté d'âme et même par pitié que le riche Hosni Moubarak a voulu offrir des vacances à notre premier ministre nécessiteux et à sa petite famille qui avaient bien besoin de quitter leur quartier difficile et de respirer le bon air.

Fillon se défend en disant que les troubles n'avaient pas encore éclaté en Egypte et que l'aspiration du peuple à un semblant de liberté ne s'était pas encore fait entendre sur la place Tahrir.

A ce moment, la dictature n'était pas contestée. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il a accepté l'invitation: rien ne vaut un pouvoir fort pour assurer la tranquillité des touristes et leur éviter tout contact avec la populace. La démocratie, c'est déjà assez ennuyeux en France, ce n'est pas la peine de la subir à l'étranger!

PS: Et le Maroc qui, dit-on, risque de bouger aussi? Tous ceux qui, entre Noël et le Jour de l'an, sont allés chercher le soleil chez M6, roi très autoritaire et très riche d'un pays très pauvre et très corrompu, doivent se sentir dans leurs petits souliers (sans parler de DSK qui y possède un riad que l'on dit superbe). Que n'ont-ils suivi l'exemple de Copé qui lui, en allant à Cuba, a choisi une dictature plus solide?

Selon "The Guardian", cité par LeMonde.fr, la famille Moubarak, c'est à dire Hosni et ses deux fils, Gamal et Alaa, serait à la tête d'une fortune d'un montant estimé entre 40 et 70 milliards de dollars. La fourchette est large! Trente milliards!

Il s'agit, comme c'est l'habitude des dictateurs du monde entier qui craignent de devoir quitter un jour le pouvoir et leur pays "dans l'honneur et la dignité" (et arrêtez de rigoler) de comptes bancaires ouverts dans différents pays du monde (pas tous les oeufs dans le même panier, c'est un principe), de placements dans l'immobilier à Londres, à New York, à Los Angeles, en France, en Suisse, en Allemagne, à Dubaï et dans des complexes hôteliers sur les côtes de la mer Rouge.

Ajoutez à cela, disent des gens qui savent, une fabuleuse collection de diamants (un truc qui ne prend pas de place et qu'on peut emporter avec soi en cas d'extrême urgence si "l'honneur et la dignité" sont incompatibles avec la rapidité) et vous avez un total plus que confortable. 

Rappelons-nous qu'en trente ans, les Etats-Unis auraient versé à l'Egypte deux milliards de dollars par an. Soit une bonne soixantaine de milliards de dollars.

Au moins, les USA savent où est passé leur pognon.

Plus le temps passe et plus on voit de femmes voilées parmi les manifestants de la place Tahrir.

Evolution de la révolution ou parti-pris des journalistes?

On se plaît à saluer l'attitude de l'armée égyptienne qui, pour l'instant, affiche une forme de neutralité vis-à-vis des manifestants qui demandent le départ de Moubarak. On voit en elle le soutien à un futur régime démocratique.

Mais quelle est la solidité d'une démocratie qui ne tiendrait que tant qu'elle ne déplaît pas aux généraux?

Et quelle est la légitimité démocratique d'une armée qui a soutenu une suite de dictateurs sortis de ses rangs et dont le seul mérite est de ne pas avoir tiré (pas encore) sur la foule?